Octobre 2015
La chalarose tient son nom de la forme asexuée du champignon responsable de cette maladie, le Chalara fraxinea. Mais c’est la forme sexuée du champignon qui est à l’origine de la dispersion de la maladie et de l’infection de nouveaux sujets, par des spores facilement disséminées par le vent. Spécifique du frêne, ce pathogène a été détecté pour la première fois en France en 2008, en Haute-Saône. Après avoir annoncé son origine en Europe de l’Est, les chercheurs ont découvert que ce même champignon était décrit sous un autre nom en Asie du Sud-Est. Inoffensif sur les frênes asiatiques, Chalara fraxinea s’avère très pathogène sur le frêne commun de nos régions, mais aussi le frêne oxyphylle et le frêne noir.
Un premier arrêt dans un bas-perchis de frêne a permis de présenter aux participants, les différents symptômes caractéristiques d’une attaque de Chalara fraxinea : flétrissement des feuilles et des pousses, nécroses et mortalité de branches, descentes de cimes, chancre au collet.
Le champignon infecte d’abord les feuilles puis se propage vers les pousses de l’année via les pétioles, provoquant la nécrose puis le dessèchement des rameaux. Les mortalités de branches affaiblissent les arbres atteints, réduisent leur croissance et les rendent plus sensibles aux parasites secondaires (hylésine du frêne, armillaire).
Le pathogène peut aussi infester la base du tronc, via les lenticelles de l’écorce : se forme alors un chancre qui peu à peu va ceinturer le collet de l’arbre, conduisant à sa mort. Les chancres au collet sont le principal facteur de mortalité des arbres atteints.
Si toutes les classes d’âge sont concernées par la maladie, cette dernière évolue différemment selon le stade de développement des arbres. La mortalité est plus forte et plus rapide dans les jeunes peuplements car les nécroses sur les petites tiges sont rapidement ceinturantes. La compétition entre les semis ou gaulis d’une régénération naturelle dense augmente encore la mortalité.
Dans les peuplements adultes, l’évolution de la maladie est plus lente : les arbres peuvent émettre des gourmands (branches qui se développent sur le tronc) pour reconstituer une partie de leur houppier. Et les chancres encerclent moins rapidement la base du tronc, plus gros en diamètre. L’état sanitaire des arbres nécrosés au collet se dégrade toutefois plus vite que celui des arbres sans nécroses.
Premier conseil de bon sens : stopper les plantations de frêne et limiter les travaux dans les jeunes peuplements. Le retour sur investissement des travaux de détourage ou de taille de formation est en effet plus qu’incertain.
Dans tous les cas, un diagnostic s’impose avant toute intervention, à faire lorsque les arbres sont encore en feuilles. Deux critères sont à observer : la mortalité des branches, qui indique l’intensité de l’infection, et la présence de nécrose à la base des troncs, qui détermine les chances de survie de l’arbre. Un frêne est considéré comme fortement atteint si la mortalité des branches excède 50 % du houppier ou si la nécrose au collet occupe plus de 50 % de la circonférence. Il faut alors envisager sa récolte. Mais l’urgence de récolter intervient surtout en présence d’une nécrose importante qui va accélérer le dépérissement de l’arbre et risque de déprécier la grume (coloration brunâtre du bois).
La répartition des dégâts est également à prendre en compte : la présence de secteurs moins atteints, ou d’autres essences adaptées à la station, va intervenir dans les choix sylvicoles.
Le peuplement de jeunes frênes visité est très fortement atteint et n’a plus d’avenir. Mais un diagnostic attentif de cette parcelle avec le propriétaire a permis de distinguer deux zones. Dans l’une, des jeunes tiges d’érable, de merisier et de chêne sont présentes en nombre satisfaisant. Un détourage de ces tiges sera réalisé pour constituer le futur peuplement. Dans l’autre, le peuplement est quasi pur en frêne : un broyage suivi d’un reboisement est la solution proposée.
Plus loin, dans une futaie de frêne adulte, les dégâts sont plus hétérogènes. Des tiges fortement touchées ont été exploitées l’hiver dernier. Mais il importe de conserver aussi longtemps que possible les individus qui déclarent peu ou pas de symptômes. Le maintien d’arbres tolérants en forêt est essentiel pour établir la base d’une future population tolérante.
Le frêne étant une essence assez exigeante en eau et en richesse minérale, les stations qui lui sont favorables permettent souvent la culture d’autres feuillus précieux comme le merisier, les érables, les noyers noirs ou hybrides, ou encore le chêne sessile. De très belles plantations de noyer hybride, érable sycomore ou alisier torminal ont été visitées en fin de réunion. Malgré la maladie du frêne, les forêts de la Plaine d’Alsace ont encore de beaux peuplements à nous offrir. Pour finir, un grand merci à Raymond d’Andlau pour son accueil chaleureux et tous les passages spécialement débroussaillés pour faciliter nos déplacements en forêt !
Maren Baumeister - CRPF
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