Juin 2016
En réaction à l'apparition de la chalarose du frêne, le CNPF a décidé de fédérer les partenaires concernés à travers un programme d’étude national intitulé Chalfrax pour répondre aux multiples questions que se posent les forestiers impactés. Ce programme a d'ores et déjà conforté des résultats directement utilisables par les sylviculteurs.
Chalfrax a concrètement débuté dès 2013 par le questionnement des CRPF des régions touchées par la maladie (Lorraine-Alsace, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Bourgogne, et Nord-Pas-de-Calais-Normandie). Après cet audit, 5 axes de travail ont été définis:
Identifier et estimer la part de la composante génétique dans la résistance au champignon responsable de la chalarose et initier la constitution d'une population de frênes tolérants.
Expérimenter des scénarii sylvicoles pour contenir le développement de la maladie à l'échelle d'une parcelle.
Bâtir une méthode de description de l'état sanitaire des peuplements pouvant être utilisée dans le cadre d'une réorientation de gestion. Tester et évaluer la faisabilité technicoéconomique d'itinéraires sylvicoles économes pour gérer les peuplements atteints.
Evaluer la ressource française en bois de frêne, établir un état des lieux sur les marchés existants et les enjeux économiques. Mesurer l'impact de la chalarose sur la qualité du bois et sur la production des arbres adultes, en fonction du niveau d'infection.
Recueillir les témoignages des pays européens touchés par la chalarose et profiter du retour d'expériences de leurs politiques forestières déjà mises en œuvre. Communiquer les résultats du programme Chalfrax.
De multiples partenaires sont associés à la mise en oeuvre de cette feuille de route, comme l'INRA pour le volet recherche sur le champignon, les coopératives, en particulier COFORAISNE, pour la qualité des bois et la ressource, le Département de la Santé des Forêts dans l'ensemble de la démarche et l’ONF, impliqué plus légèrement, dans l'axe 2, avec la mise à disposition de parcelles en forêt domaniale.
L'ensemble de ce programme Chalfrax devrait se déployer jusqu'en 2019. Certaines pistes de recherche et de réflexion donneront probablement aux forestiers des conclusions précieuses avant cette échéance.
Le champignon responsable (Hymenoscyphus fraxineus, chalara fraxinea sous sa forme asexuée) a été détecté en 2008 en Haute- Saône, mais les scientifiques pensent aujourd'hui que sa présence remonte à 2006. Les frênes communs et oxyphiles sont impactés.
Le frêne à fleur, espèce autochtone également, et les frênes rouge et d'Amérique, surtout présents en ornementation, semblent peu sensibles et devraient résister à cette pathologie. La maladie nous vient d’Europe de l’Est (Pologne-Allemagne), mais aurait pour origine le Japon où les frênes locaux vivent sans problème avec ce champignon.
En Europe, 25 ans après sa détection, ce champignon est présent de la Russie à l'Atlantique et de la Scandinavie à la Croatie. Seuls les frênes du pourtour méditerranéen sont indemnes.
Ce petit champignon en apparence inoffensif peut s'observer sur les pétioles de feuilles de frênes au sol en été, où il forme de petites fructifications blanches. Des spores sont libérées de ces fructifications et vont infecter l'arbre à deux endroits. Le champignon attaque tout d’abord les feuilles, puis progresse via le pétiole jusqu'au rameau où il crée une nécrose brun orangé en fuseau caractéristique.
Beaucoup de mortalité dans les gaulis et perchis
En revanche, il ne progresse pas dans le système vasculaire. Le dépérissement des rameaux n'est dû qu'à la multitude de points d'infection. Il pénètre également au niveau du collet. Cette zone est en contact avec les feuilles infectées tombées au sol en automne. Cette contamination crée une nécrose qui, progressivement, ceinture l'arbre. Ce deuxième symptôme se développe d'autant mieux que la quantité de spores de champignon est élevée. Cette atteinte peut être difficile à détecter, elle demande une auscultation minutieuse.
L'impact de la maladie sur les frênes dépend de l'âge du peuplement. Sur les régénérations naturelles et les jeunes plants, le taux de mortalité annuelle est de 30 à 40 % des tiges. Pour les stades suivants, jusqu'à un diamètre de 25 cm, la mortalité annuelle actuellement est de l'ordre de 10 %, mais peut monter à près de 40 % si des nécroses conséquentes (plus de 75 % du diamètre) au collet sont présentes.
Développement des gourmands dans un houppier de Frêne atteint
Quant aux frênes adultes, de plus de 25 cm de diamètre, ils meurent peu. Leur mort est directement liée à la progression de la nécrose au collet, liée à l'antériorité de la présence de la maladie. Seuls les arbres avec une nécrose occupant plus de 75 % du collet ont un risque de mortalité significatif l'année suivante. Avant d'entraîner la mort des arbres, cette pathologie induit bien évidement une baisse de croissance.
Autre point mis en avant par la recherche, les frênes ne sont pas tous atteints de la même façon, aussi bien au niveau des houppiers que du collet.
Nécrose au collet, qui entraînerait inéluctablement la mort de l'arbre
Certains individus résistants pourraient contenir la maladie et cette capacité pourrait être transmise avec une héritabilité de bon niveau à la descendance.
Dernier point observé par les scientifiques : il semble que dans les régions très atteintes, l'évolution de la maladie soit ralentie. Le constat pourrait être lié à ce phénomène de résistance, tous les frênes qui devaient être impactés l'ont été, et la maladie butte maintenant sur des individus plus résistants. Malgré ces observations de bon augure, il convient de rester prudent.
Les consignes déjà délivrées aux sylviculteurs sont toujours d'actualité:
Catherine Négrignat - CRPF
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