Juillet 2017
Dans notre dernier numéro, nous vous faisions part du décès de Christian Courrivault qui fut technicien du CRPF dans les Vosges de 1974 jusqu’à sa retraite en 2007. Comme nous vous l’avions annoncé, nous vous proposons un article sur les préceptes qu’il aimait enseigner aux propriétaires comme à ses pairs techniciens.
La profonde passion de Christian pour la forêt et les sylviculteurs était connue de tous. Esprit vif et grand amateur d’humour, il savait " tordre " les mots avec brio. " Plus il y a de typologies, moins il y a de types en forêt " brocardait-il, avec malice, les nouveaux outils de description des peuplements dont il savait, par ailleurs, tirer le meilleur parti !
" La coupe rase, c’est le début des enherbements " fait partie de ses saillies dont nous nous amusons encore. Mais qui a déjà réalisé des coupes à blanc importantes sur plateau lorrain comprend à quel point cette pointe d’humour trouve un écho concret sur le terrain !
Mais Christian était aussi un amoureux de technique. Il connaissait bien la forêt et les sylviculteurs et cherchait en permanence à adapter les pratiques forestières aux particularités de la forêt privée et surtout aux propriétaires. C’est ainsi qu’il a milité très tôt pour la maîtrise des coûts. Ses conseils et sa défense de la sylviculture à faible densité avec utilisation du recrû naturel ont ouvert la voie à de nouvelles réflexions et à de nombreux débats ! Il avait mis en place des parcelles expérimentales, notamment avec Gérard Armand de l’IDF, autre collègue aujourd’hui disparu, pour étayer notre savoir sur les différentes techniques de mise en valeur des forêts.
Quelques repères expliqués par Christian parlent encore à beaucoup d’entre nous (ces écrits restent disponibles dans les anciens numéros de FLOREAL et de Forêt magazine). Dans le texte qui suit, nous prendrons quelques libertés avec le vocabulaire forestier :
La " règle des 20 " : c’est un moyen simple à mémoriser pour estimer l’écartement nécessaire entre les arbres feuillus à un diamètre donné. Ainsi, si l’on veut produire des arbres de 60 cm de diamètre, l’écartement final optimal entre tiges sera de 0.6*20 = 12 m.
La méthode " à 6 mètres " par analogie à la méthode " assimil " où, plutôt que de réaliser des entretiens en plein dans les jeunes peuplements, on ne désigne un arbre que tous les 6 mètres en ne travaillant qu’à leur profit. Cela permet de disposer, par la suite, d’un nombre suffisant d’arbres pour effectuer un choix définitif.
La " futaie claire " : depuis longtemps, Christian estimait que la sylviculture de peuplements feuillus où l’on essaye de s’occuper de beaucoup d’arbres avec des densités élevées n’était pas rentable. Il lui préférait la sylviculture d’arbres où l’on concentre les travaux sur moins de tiges (les fameux arbres " repère " référence à la marque du même nom) mais que l’on soigne mieux et que l’on éclaircit vigoureusement ou autrement dit : " moins mais mieux " ! Cette vision " futaie claire " résonne particulièrement en ces temps où les préoccupations sur les changements climatiques et l’utilisation optimale de l’eau prennent une place prépondérante.
La taille : pratique indissociable de la sylviculture d’arbre, Christian considérait que l’on pouvait " rattraper " les formes de presque tous les arbres en pratiquant des tailles sévères et régulières. Même s’il faut reconnaître que cela suppose une technicité élevée et une grande assiduité dans les interventions, il a souvent réussi à " fabriquer " des fûts de qualité.
Christian jugeait que la régénération naturelle était une solution souvent pertinente. Il répétait cependant qu’une plantation d’un nombre restreint d’arbres, outre le fait d’assurer un minimum de sujets d’avenir, incitait les propriétaires à s’intéresser davantage à leurs parcelles. " On vient plus contrôler et surveiller quand on a réalisé des travaux de plantation ! "
Au-delà de la technique, Christian, c’était aussi " l’intelligence de l’humain ", sachant, par-delà ses connaissances pointues, se mettre à la portée des débutants. Par l’observation, il conduisait les sylviculteurs sur le chemin de la réflexion. Il s’était également investi très tôt dans le regroupement de la petite propriété et avait notamment participer à la création de l’Association forestière de Petitmont et environs où son souvenir reste très présent.
Christian avait continué à s’intéresser à la forêt depuis sa retraite jusqu’à son accident de la route en 2011. Nous garderons de lui le souvenir d’un homme passionné et disponible pour les sylviculteurs et ses collègues.
Cyril VITU - CRPF
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