Gestion, réglementation et administration
Janvier 2016
Après les adjudications de chasses en Alsace-Moselle (début 2015), le problème des surdensités de gibier revient sur le devant de la scène, avec des décisions de justice et l'apparition du Livre Blanc. Quelles sont ces décisions ? Qu’apportent-elles ? Où en sommes-nous ? Quelles sont nos propositions ?
La justice vient de donner gain de cause aux propriétaires forestiers dans diverses procédures. Elle rappelle à tous (maires, administrations et chasseurs) que le droit de chasse est attaché au droit de propriété ; il y a lieu de mieux respecter les propriétaires et leurs forêts, indiquant ainsi qu’une activité de loisirs ne saurait nuire à une filière économique stratégique, d’autant que la forêt joue un rôle essentiel dans l’équilibre du climat.
Par ailleurs, la publication du "Livre blanc pour un équilibre faune-flore en Alsace" vient témoigner de notre volonté de dialoguer avec les chasseurs, à condition qu’ils ne soient pas dans le déni sur l’ampleur du déséquilibre constaté aujourd’hui.
Fin 2014, la Cour de Cassation a confirmé un jugement condamnant une commune à rembourser 8 années de taxes payées indûment par un propriétaire réservataire, soit plus de 80.000 €, à la suite d’anomalies constatées dans la consultation des propriétaires sur l’abandon du produit de la chasse à la commune. Celle-ci n’avait pas procédé à la consultation de tous les indivisaires, comme le prévoit la loi.
Puis, en septembre dernier, le Tribunal d’Instance a condamné un chasseur récalcitrant et son assurance, à rembourser 38.000 € à un propriétaire forestier, du fait de dégâts d’écorçages répétés depuis plus de 5 ans. Ce jugement est important, car il retient une prescription de 30 ans et considère que le fait de réaliser le plan de chasse minimum ne dispense pas de devoir assumer l’indemnisation des dégâts. Le juge a confirmé clairement qu’en Alsace-Moselle, c’est bien le Droit Local qui s’applique et non la loi générale française.
La chasse est un loisir, certes légitime et nécessaire, mais ces jugements rappellent qu’il faut tenir compte des intérêts des 120.000 propriétaires forestiers d’Alsace-Moselle.
D’autres procédures sont en cours et de nouvelles seront entamées, pour que les droits des propriétaires forestiers soient défendus.
Préfacé par le Préfet et le Président de la Région Alsace, il s’agit d’un cri d’alarme du monde forestier dans son ensemble (Communes Forestières, ONF, Forêt Privée) sur l’état dégradé des forêts en raison de l’augmentation des populations de cervidés et de leur extension sur tout le territoire.
Une analyse des plans de chasse de cerfs sur toute la partie montagneuse de l’Alsace, de Wissembourg à Masevaux, montre que tout le Massif Vosgien est colonisé et que sur 70 % du territoire, on tire régulièrement plus d’un cerf aux 100 ha, ce qui équivaut à une population d’au moins 4 cerfs aux 100 ha boisés.
Ces zones nécessitent de toute évidence un rééquilibrage, comme le souligne d’ailleurs un rapport de janvier 2012, rédigé par des inspecteurs généraux du Ministère de l’agriculture et de celui de l’environnement.
Côté forêt, une enquête réalisée par l’ONF et le CRPF auprès des forestiers montre que sur 70 % des surfaces forestières en Alsace, les forestiers n’arrivent plus à régénérer toutes les essences et en particulier, le Chêne et le Sapin, essences les plus appétentes pour le gibier.
Les réactions à ce Livre Blanc ne se sont pas fait attendre, souvent par presse locale interposée. Les commentaires, rapportant par exemple que dans les Pays de l’Est "tout est planté et clôturé", ou laissant entendre que la faune et la flore doivent pouvoir trouver seules leur équilibre, procèdent seulement de la confusion.
Les chasseurs doivent accepter de voir la réalité de la situation actuelle. Le message essentiel du Livre Blanc vise à rechercher une solution équilibrée et non à éradiquer les cervidés ; nous ne pourrons trouver cette solution qu’ensemble.
Vincent OTT
Président de Forestiers Privés d’Alsace
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