Octobre 2014
Floréal n°98 - Septembre 2014
Remettre en valeur des parcelles totalement sinistrées par la tempête du 26 décembre 1999 en s’appuyant... sur le bouleau ! C’est le pari que plusieurs propriétaires ont accepté de relever dans le Lunévillois. Présentation d’un itinéraire sylvicole peu banal où la filière Bois-Énergie apporte un précieux concours.
Âgés de 15 ans, les peuplements de bouleau et tremble (appelés recrûs) constituent désormais un gisement de matière première ligneuse particulièrement adapté à la production de plaquettes forestières.
La remise en valeur des parcelles qu’ils occupent peut donc s’élaborer à partir d’un scénario sylvicole relativement simple : récolter la totalité du peuplement, puis reboiser sur un terrain très peu encombré par les rémanents (la production de plaquettes forestières valorise la quasi-totalité de la biomasse), avec une essence adaptée à la station. Simple donc, ce scénario se révèle de plus économiquement attractif car l’opération peut générer un profit substantiel au propriétaire. Le coût du reboisement sera ainsi financé en partie par la recette issue de la coupe. Ce scénario a donc de quoi séduire.
Cependant, l’aventure de la plantation et de son nécessaire entretien pendant de nombreuses années est difficile à envisager pour certains propriétaires. La tempête de 1999 a mis à mal leur motivation, et fait naître une crainte durable pour ce qui concerne l’investissement forestier. Pour autant, laisser en l’état leur patrimoine forestier n’était pas satisfaisant non plus. La proposition de mettre en place un peuplement de qualité à partir de l’existant, en apparence sans intérêt, et pour un coût modéré, a donc reçu un accueil des plus favorables.
Le choix de produire du bouleau de qualité passe tout d’abord par une indispensable phase de diagnostic. Il s’agit en particulier d’apprécier la possibilité de recruter un nombre suffisant de tiges de franc-pied bien conformées. Dans les peuplements où ce potentiel existe, la mise en place de l’itinéraire consiste à marquer des cloisonnements d’exploitation et à désigner dans les bandes boisées, les tiges d’avenir (environ 200 tiges/ha). Ces dernières feront l’objet d’un détourage afin de supprimer les tiges qui gênent le développement de leur houppier.
Les tiges sont sectionnées à la base et disposées en fagots en bordure du cloisonnement. Les fagots sont ensuite évacués par porteur vers une place de dépôt. La possibilité de valoriser les produits en plaquettes forestières explique la mécanisation de l’intervention. L’exploitation du bois énergie a ses spécificités et implique alors de respecter deux modalités. La première concerne les cloisonnements. Ceux-ci devront avoir une largeur de 4 mètres afin d’éviter de blesser les arbres sur pied lors de l’opération de débardage. La seconde, imposée par la portée du bras de la pelle, exige que les bandes boisées aient une largeur maximale de 14 mètres. Au final, c’est en moyenne 50 tonnes de biomasse par hectare qui sont récoltés et rémunérés environ 3 €uros la tonne au propriétaire. C’est peu ? Bien au contraire, sans l’apport de la filière bois-énergie, ce type d’intervention nécessiterait d’être réalisé par un ouvrier sylvicole, sans commercialisation du bois abattus !
A Petimont (54), cet itinéraire s’est révélé particulièrement satisfaisant dans la mesure où la taille du chantier était importante. En effet, l’action "Plan de Développement de Massif" (PDM), impliquant plusieurs propriétaires dans une démarche commune, a joué parfaitement son rôle en regroupant "l’offre" et a ainsi assuré l’optimisation des moyens tant humains (gestionnaire) que techniques.
Souvent peu considéré et mis en valeur, le bouleau montre dans ce contexte, sa capacité à répondre à 2 enjeux majeurs pour la filière forêt bois : s’inscrire comme une vraie solution sylvicole et jouer un véritable rôle dans l’approvisionnement de biomasse ligneuse, dont les besoins ne cessent d’augmenter.
La sylviculture du bouleau est donc bien plus qu’une alternative. En cela, sa réussite dépend, comme pour les autres essences dites plus nobles, d’un suivi rigoureux et d’interventions régulières et adaptées.
Alban Depaix - CRPF
Les bois mobilisés à des fins énergétiques présentent trop souvent les mêmes caractéristiques que les bois d’industrie, et il n’y a dans ce cas aucune matière supplémentaire mobilisée par rapport au bois d’industrie. Les chantiers strictement bois-énergie sont rares ! C’est pourquoi, il nous paraît intéressant de présenter aux lecteurs de FLOREAL, un chantier-pilote que nous avons mis en œuvre.
Ce chantier a été réalisé dans une forêt privée de Saint-Louis les Bitche, qui n’a pas été épargnée par la tempête de 1999, en particulier dans les peuplements d’épicéas adultes. Sur les 200 ha détruits, les parties dépourvues de régénération ont été reboisées en douglas (auxquels s’ajoutent des îlots de mélèzes et feuillus précieux en diversification), soit 140 ha environ.
Le solde de 60 ha a été géré en régénération naturelle d’épicéas. La densité des semis y est très élevée (plusieurs dizaines de milliers d’arbres/ha), alors que ces régénérations se sont installées sur des sols très bouleversés par les souches des semenciers adultes renversés.
Contrairement à bien d’autres essences, l’épicéa ne s’individualise pas et aucun sujet ne prend réellement le dessus sur ses voisins. Les peuplements ne se structurant que très lentement, les bois montent en hauteur mais ne prennent pas de diamètre. Ce type de croissance pose le problème de la productivité ; en effet, la production la plus rémunératrice est le bois d'oeuvre qui nécessite de gros diamètres.
D’autre part, la stabilité à moyen et long terme n’est pas assurée ; un peuplement ayant de la hauteur mais peu de diamètre sera particulièrement sensible aux coups de vents.
A partir de ce constat, il est impératif de faire baisser la densité des arbres. L’objectif est de la faire passer de 30 000 tiges en moyenne/ha à 1 000 tiges/ha, et cela sur 10 ans environ.
La solution préconisée, avant l’apparition du bois-énergie, aurait consisté en une ouverture de cloisonnements au broyeur lourd, suivie de dépressage à la main en bois perdu (en 2 passages) ; le coût de ce chantier aurait été de plusieurs dizaines de milliers d’euros. La solution offerte par le bois-énergie est économiquement intéressante : le principe est le même que dans une plantation (ouverture de lignes, puis éclaircie), à la différence près que le diamètre moyen des bois est ici de 4 cm, en visant une opération au moins blanche pour le propriétaire. Compte tenu du très faible diamètre des bois à prélever, il s’agit d’un chantier expérimental pour la filiale de Dalkia, For'Est Exploitation représentée par Olivier Debais à Pulnoy (54).
Hiver 2013-2014 : ouverture de cloisonnements de 4 mètres de large tous les 15 mètres d’axe en axe.
2015 : premier dépressage dans les bandes. Ce travail sera très compliqué à réaliser car actuellement les tiges sont tellement denses qu’il est excessivement compliqué pour un opérateur de travailler avec précision. Nous testons cette technique dès cette année dans les Ardennes belges sur le même type de peuplement. Cette expérience nous permettra d’affiner les méthodes de dépressage à utiliser à Saint- Louis.
2018 : second dépressage dans les bandes.
2023 : première éclaircie classique !
Un sécateur sur pelle à chenilles pour couper les bois puis les mettre en javelles (gerbe) sur la bordure des cloisonnements, et un porteur classique pour récupérer le bois.
NB : Compte tenu des volumes importants que cela représente, il est indispensable de disposer d’une bonne desserte et notamment de sur-largeurs afin de stocker les bois.
Aurélien Barthélémy - Expert Forestier
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