Vos bois intéressent beaucoup de monde !

Floréal n°105

Le propriétaire a naturellement une vision patrimoniale de son bien, mais il se considère rarement comme producteur. Dans mon département, j’ai toujours poussé les adhérents de notre Syndicat à mieux prendre en compte la dimension économique de leurs propriétés forestières, et à se considérer comme acteurs à part entière de la filière bois. Je ne sais si beaucoup d’entre vous m’ont écouté, voire entendu. Aujourd’hui, je veux certes vous redire l’importance d’être acteurs économiques, mais aussi de ne faire aucune concession sur vos prérogatives de propriétaire.

Avec la perspective de besoins de plus en plus importants tant en bois énergie qu’en résineux, avec la pénurie liée à l’export massif de grumes vers les pays lointains, je suis convaincu que certains "acteurs" de la récolte ont bien intégré que la ressource "supplémentaire" se trouvait en forêt privée et que l’on aimerait bien pouvoir se passer de vous pour pouvoir décider du sort de vos bois. En quelque sorte vous êtes "des empêcheurs de tourner en rond".

De nombreux indices s'accumulent et vont dans ce sens :

• Depuis le fameux discours d’Urmatt du Président Sarkozy, les rapports et les déclarations officiels tentent de culpabiliser les propriétaires forestiers : ils manqueraient de volonté pour mobiliser plus et mieux.
• Les textes du Gouvernement actuel prônent la gestion collective pour compenser les effets du morcellement plutôt que privilégier l’amélioration foncière.
• La mise sur pied d’appels à concurrence, ouverts à toutes les initiatives privées, pour des actions relevant de l’intérêt général, par exemple le renouvellement des peuplements pauvres par des aides à la plantation, ou bientôt, dit-on, l’animation de Plans de Développement de Massifs.
• La parution d’instructions techniques sur le contrôle des plans simples de gestion, prévoyant des sanctions pour manque de suivi des plans, alors même que les coupes abusives ne sont pratiquement jamais sanctionnées

Vous noterez que l’on n’évoque jamais les forêts communales. Bien au contraire, on introduit dans le code forestier un droit de préemption à leur profit…

Tout cela, chers amis propriétaires, pour que vous compreniez bien que vos bois intéressent beaucoup de monde et, osons le dire, la chasse est ouverte : vos bois sont convoités, ils prennent de la valeur !

Dans ce climat un peu malsain, il est important de gérer de manière dynamique vos forêts. Vous devez vous entourer de conseils, car on "vous attend au coin du bois". Si vous n’êtes pas aguerris, il est primordial de faire appel aux hommes de l’art qui ne manquent pas sur notre territoire, Experts Forestiers, Techniciens Indépendants, Coopératives : ils sont là pour vous accompagner.

Dans le doute, n'hésitez-pas à vous rapprocher de votre syndicat ! Vous pouvez vous appuyer sur les techniciens du CRPF qui sont à votre disposition. Je vous rappelle que les élections des conseillers des centres vont avoir lieu en début d’année prochaine ; c’est plus que jamais important que vous vous exprimiez par votre vote, pour montrer que vous ne démissionnez pas de votre rôle de propriétaire.

Lors d’une récente réunion, j’entendais le monde agricole défendre le modèle européen de l’agriculture familiale, menacée par des sociétés internationales qui essaient d’acquérir du foncier. Je peux faire le parallèle : face à un Etat de plus en plus pressant, aux traders internationaux qui peuvent faire ou défaire le tissu industriel, aux grandes sociétés faisant commerce d’énergie, sachons défendre le modèle développé par les propriétaires forestiers privés et restons maîtres de notre gestion.

Nous réussirons à condition de savoir évoluer. Je suis confiant, nous avons toujours su le faire. Pour preuve, la dernière initiative, unique en France, qui vient d’être prise entre l’UFE et l’Union régionale des Scieurs Feuillus de Lorraine.

Après ce mouvement d’humeur, ou plutôt ce rappel à la réalité, sachons profiter de tous les outils mis à notre disposition pour amorcer une nouvelle campagne qui s’annonce favorable.

Pour une filière solidaire,

Didier Daclin - Président de Forestiers Privés de Moselle